Obsolescence logicielle : M à J vs. Confiance dans le reconditionné

par | Nov 5, 2024 | Economie circulaire, Numérique Responsable, Reconditionnement IT | 0 commentaires

L’obsolescence programmée n’est plus seulement matérielle ; elle devient aujourd’hui un phénomène logiciel qui pénalise les utilisateurs et l’environnement. Imaginez un ordinateur qui fonctionne parfaitement jusqu’à ce qu’une mise à jour impose des exigences qui le rendent inutilisable ou altèrent ses performances. Dans le secteur du reconditionné, cela devient une véritable problématique : des appareils qui auraient pu durer plusieurs années se retrouvent brusquement limités, voire inutilisables. Les grandes entreprises technologiques, en dictant les règles d’évolution de leurs systèmes, rendent le matériel obsolète bien plus tôt que nécessaire. Mais est-ce réellement inévitable ?

L’impact des mises à jour sur les appareils reconditionnés

Les mises à jour du système d’exploitation, censées améliorer les performances, corriger des bugs, apporter de nouvelles fonctionnalités et renforcer la sécurité des appareils, peuvent en réalité provoquer des problèmes matériels importants. Ce phénomène, observé depuis plusieurs années, concerne les grands noms de la tech et impacte directement les utilisateurs.

L’impact des Mises à jour sur les appareils Windows

De nombreux utilisateurs de Windows ont constaté que certaines mises à jour affectaient la gestion de l’énergie ou la compatibilité des pilotes, des éléments essentiels pour les performances de leurs appareils. Souvent, ces mises à jour intègrent de nouveaux pilotes qui ne sont pas compatibles avec le matériel plus ancien. Cela peut entraîner des dysfonctionnements, comme des problèmes de batterie ou des ralentissements, ce qui conduit souvent les utilisateurs à abandonner des appareils encore fonctionnels.

Apple et l’obsolescence de ses batteries

Apple a également suscité la controverse en ralentissant volontairement d’anciens modèles d’iPhone lorsque leurs batteries montraient des signes de vieillissement. En 2017, l’entreprise a admis cette pratique, justifiée selon elle par une volonté de prolonger la durée de vie de la batterie et de prévenir des arrêts intempestifs. Cependant, pour de nombreux utilisateurs, ce « bridage » a été perçu comme une incitation déguisée à acheter de nouveaux appareils. Bien qu’Apple ait ensuite proposé un programme de remplacement de batteries à prix réduit, de nombreux consommateurs se sont sentis trahis. Cela a également nui à l’image du matériel reconditionné : certains utilisateurs hésitent désormais à acheter un iPhone d’occasion, craignant que de futures mises à jour ne réduisent encore ses performances.

L’obsolescence logicielle : une menace pour la durabilité du matériel

L’obsolescence logicielle, bien qu’implicite, se manifeste lorsque des mises à jour rendent certains appareils incapables de fonctionner correctement. Que ce soit avec Windows, où les mises à jour perturbent la compatibilité matérielle, ou avec Apple, où elles modifient la gestion de la batterie, ces pratiques réduisent la durée de vie des appareils. Pour les entreprises de reconditionnement, ces pratiques posent un défi majeur : comment rassurer les consommateurs et leur garantir la fiabilité d’appareils susceptibles d’être affectés par des mises à jour non contrôlées ?

 

Effets de l’obsolecence logicielle sur la confiance des consommateurs et la durabilité

Les pratiques d’obsolescence programmée, en particulier celles qui proviennent de mises à jour logicielles imposées, nuisent considérablement à la perception du matériel reconditionné et sapent la confiance des consommateurs dans le marché du réemploi. Quand un appareil reconditionné cesse brusquement de fonctionner ou présente des défauts suite à une mise à jour, les clients associent souvent ces problèmes à l’état supposé dégradé de l’équipement reconditionné. Cette confusion est d’autant plus exacerbée par le manque de transparence des grandes entreprises sur les véritables causes de ces défaillances.

Un obstacle majeur à la promotion de l’économie circulaire

Le secteur du reconditionné s’appuie sur la valorisation d’équipements encore performants et leur redéploiement pour éviter le gaspillage et les déchets électroniques. Or, quand une mise à jour logicielle dégrade volontairement ou indirectement les performances d’un appareil, cela compromet l’efficacité du matériel reconditionné, créant une déception chez le client qui pensait investir dans un produit fiable et durable. Ces expériences poussent les consommateurs à envisager que seul du matériel neuf peut garantir une utilisation sans faille, alimentant ainsi le cercle vicieux de la surconsommation et de la production constante de nouveaux appareils.

La perception biaisée des appareils reconditionnés

Pour beaucoup d’acheteurs, un appareil reconditionné est synonyme de « deuxième chance » : il est perçu comme une alternative écologique et économique aux produits neufs. Pourtant, les pratiques d’obsolescence logicielle renforcent le stéréotype d’un produit reconditionné moins fiable, plus exposé aux problèmes techniques, voire fragile. L’impact psychologique est puissant : une panne après une mise à jour instille la peur d’un achat « à risque », amenant de nombreux consommateurs à ne plus envisager le reconditionné, craignant qu’il ne puisse plus suivre les évolutions logicielles des systèmes d’exploitation modernes.

Les effets sur les acteurs du reconditionné

Pour les entreprises de reconditionnement, cette situation est d’autant plus complexe que les défaillances logicielles échappent à leur contrôle. Si des clients se retrouvent avec des appareils défectueux après une mise à jour imposée, cela peut les pousser à accuser le revendeur, malgré le fait que celui-ci n’a aucun moyen de prévenir ou de corriger de tels incidents, surtout lorsque ceux-ci sont dus à des incompatibilités logicielles décidées par les éditeurs. L’image de l’entreprise souffre ainsi d’un facteur externe sur lequel elle n’a aucune emprise, rendant d’autant plus difficile la fidélisation de sa clientèle. Cela augmente le nombre de retours, entraîne des coûts additionnels pour le SAV, et surtout, détériore la confiance et la satisfaction client, éléments pourtant essentiels dans le secteur du reconditionné.

Un frein pour la transition vers le numérique responsable

L’obsolescence logicielle va aussi à l’encontre de l’objectif d’un numérique durable et responsable. Si les utilisateurs d’appareils reconditionnés abandonnent leurs efforts en faveur de la durabilité à cause de ces défaillances induites par les mises à jour, cela limite l’adoption de solutions écoresponsables. Le numérique responsable prône un usage prolongé et une revalorisation des équipements, mais les pratiques des géants technologiques réduisent cette durée de vie, créant un véritable obstacle pour les initiatives d’économie circulaire.

 

Pourquoi impliquer les géants de la tech dans le réemploi ?

Pour promouvoir le réemploi et la durabilité des équipements informatiques, il est essentiel que les grandes entreprises technologiques adaptent leurs pratiques. Proposer des versions allégées de leurs logiciels, moins gourmandes en ressources, permettrait aux appareils plus anciens de rester fonctionnels et performants. Actuellement, de nombreux dispositifs, encore parfaitement opérationnels, sont exclus des mises à jour en raison de nouvelles exigences techniques. Par exemple, Windows 11 requiert un processeur Intel de 8ᵉ génération au minimum, rendant son installation impossible sur des machines plus anciennes. Cette politique pousse indirectement les utilisateurs à renouveler leur matériel, contribuant ainsi à l‘obsolescence programmée.

Obligations légales existantes et perspectives

À ce jour, il n’existe pas de législation spécifique en France ou en Europe imposant aux éditeurs de logiciels de fournir des versions compatibles avec du matériel plus ancien. Cependant, plusieurs initiatives législatives visent à encourager la durabilité et la réparabilité des équipements électroniques :

  • Directive européenne sur l’écoconception : Cette directive impose des exigences en matière d’efficacité énergétique et de durabilité pour certains produits, mais elle ne s’applique pas directement aux logiciels.
  • Loi française relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire : Adoptée en 2020, cette loi introduit des mesures pour allonger la durée de vie des produits, notamment en favorisant la réparabilité et en luttant contre l’obsolescence programmée. Cependant, elle ne contraint pas les éditeurs de logiciels à proposer des versions compatibles avec du matériel plus ancien.
  • Propositions législatives en cours : Des députés français ont proposé des amendements visant à lever les restrictions empêchant l’installation de logiciels sur des appareils hors garantie, afin de favoriser le réemploi et la durabilité des équipements.

Vers une obligation légale ?

Pour réellement impliquer les acteurs de la tech dans une démarche de durabilité, il serait pertinent d’imposer des obligations légales les contraignant à :

  • Fournir des mises à jour logicielles compatibles avec les appareils plus anciens : Cela permettrait de prolonger la durée de vie des équipements et de réduire les déchets électroniques.
  • Transparence sur les exigences techniques : Informer clairement les consommateurs des spécifications requises pour chaque mise à jour, afin qu’ils puissent faire des choix éclairés.
  • Encourager l’écoconception logicielle : Développer des logiciels optimisés pour fonctionner sur une large gamme de matériels, y compris les plus anciens.

Ces mesures contribueraient à une économie circulaire et responsable, en alignant les pratiques des entreprises technologiques avec les objectifs environnementaux et sociétaux actuels.

 

L’obsolescence logicielle menace aujourd’hui non seulement la durabilité de nos équipements mais aussi la crédibilité du secteur du reconditionné, pourtant clé dans la transition écologique. En rendant progressivement les appareils incompatibles avec les mises à jour, les grandes entreprises technologiques encouragent une consommation excessive et nuisent à la réutilisation, au détriment des consommateurs et de l’environnement. Pour avancer vers un numérique durable, il est impératif d’imposer des obligations légales aux acteurs de la tech : des mises à jour optimisées pour tous les appareils, une transparence accrue et une écoconception des logiciels. Ces mesures garantiront aux consommateurs des produits fiables et durables, contribuant ainsi à une véritable économie circulaire et à un avenir technologique plus respectueux de l’environnement.

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Maachou Cindy

Maachou Cindy
Co-fondatrive chez Relife PC


  1. Bravo c'est très bien expliqué et je te soutiens pour sauvé notre planète